Braver le nouveau
MONDE
Charles Robinson - Anne Lefèvre
Festival de théâtre de Figeac | 28 juillet 2021.
APÉRO-RENCONTRE AVEC CHARLES ROBINSON.
Je vous livre l'impromptu que j'ai partagé en introduction de cette rencontre du romancier avec le public.
Hier, dans l’intime et l’intense de notre apéro-rencontre avec Alain Béhar, (nous étions une poignée de privilégiés), il m’est apparu que nos apéros-rencontres de chaque matin, c’est un peu notre académie d’été.
Un temps sacralisé – un temps mis à part - pour creuser ensemble notre rapport à l’art et à la vie, notre inscription au vivant, l’occasion d’interroger notre perception des œuvres, de rebondir sur les questions des uns et des autres non pour s’asséner dare dare une réponse mais bien pour exprimer nos inquiétudes ou nos rêves, partager ce qui nous meut (émeut, trouble, réjouit)
avec les compagnons et compagnes présents.

Nos apéros de 11h30, une assemblée à l’instar de celle des Mousquetaires qui officient, ces temps-ci, pour notre plus grand bonheur, dans la ville de Figeac "Tous pour un, un pour tous".

Pendant toute la durée du festival, nous savons qu’à 11h30, rien ne s’y opposera, rien ne nous empêchera ; nous avons RDV les uns avec les autres autour d’un homme ou d’une femme de l’art, metteur en scène, comédiens, auteurs, romanciers etc……
autrement dit autour d’un homme ou d’une femme qui nous ressemble et nous diffère. Comme nous nous ressemblons et nous différons.

Chaque matin à 11h30, nous inclinons nos singuliers les uns envers les autres à la recherche de ce qui nous fait davantage homme, davantage femme. Objectif ? Vivre et mieux vivre. Objectif ? Participer d’une plus harmonieuse communauté de vivants.
Ces apéros, ces rdv à la quasi mitan du jour -- notés dans nos cœurs et dans nos chairs,
chéris comme une boussole en plein cœur d’une jungle où plus aucune lumière ne pointe, où tout fait bloc, où tout fait masse, où tout se confond et s’amalgame
chéris comme une oasis en plein cœur de notre débandade séculaire qui prône la haine et l’amertume
ces apéros de 11h30, pas une réunion secrète réservée à quelques initiés mais une assemblée d’attentifs et d’attentives ouverts à l’accueil de chacun et de chacune.

Les sbires du cardinal nous tendent des embûches (fatigue, tentations…), nous les passons sereins.
Cardinal, nous voilà.
Cardinal, en ce monde du 21° siècle pressé, surexcité, abruti d’informations qui n’en sont pas, de rumeurs et de nouveaux dogmes,
à 11h30, action pause.

En ce monde de nouvelles religions en lieu et place de celles décapitées,
à 11h30, action pause.

Cardinal - je m’adresse ici et encore à notre plus terrible cardinal - à nous-mêmes - beaucoup d’entre nous sont sur le pont depuis déjà des heures quand sonne l’heure de la rencontre avec la troupe. La troupe des spectateurs et des artistes.
à 11h30, action pause.

C’est bien cela qui est en train d’advenir, ici, à Figeac, c’est bien cela qui est en train de monter, de gonfler, de se fortifier, de se constituer de festival en festival : la troupe des spectateurs et des artistes.

Comme une académie d’été où chacun participe depuis sa différence - la troupe des spectateurs et des artistes.

"Regarde-les, ils sont habités par la boue de la propagande, ils croient avoir inventé et pensé ce qu'on leur a enfoncé dans le crâne. Dans quelques années, quand "le sens de l'Histoire" sera détourné, leurs têtes seront pleines de la boue d'autre propagande.
Il y a quelques dominants : tous les autres sont dominés, passifs, comme dans beaucoup de sociétés animales, comme dans beaucoup de sociétés d'insectes.
Mais les dominants ne font eux-mêmes qu'obéir, inconsciemment, à leurs instincts de vouloir être dominants.
Les hommes libres ne sont pas dominés, ne sont pas dominants."
Ionesco, 1968

Ainsi ma perception de Charles Robinson.
Les hommes libres ne sont pas dominés, ne sont pas dominants.

Et aussi ce mot de André Marckowicz
« Ce qui compte, réellement, ce ne sont pas seulement les livres que nous pouvons faire mais aussi le chemin vers ces livres, parce que, les livres, ils ne viennent pas tout cuits, tout prêts, et leur naissance, le processus de leur venue vers vous, pour ainsi dire, elle fait aussi partie du processus."

Et aussi 
Si l’on sait peu de choses sur Charles Robinson, ce n’est pas une coïncidence : l’auteur s’est en effet appliqué à ne laisser transparaître aucun indice sur sa vie personnelle, autre que son âge et son lieu de résidence, Paris.
"J’ai remarqué qu’on a de plus en plus tendance à justifier les livres par la vie de l’auteur. J’ai donc eu ce désir de supprimer toute espèce de biographie, de manière à ce que le texte soit justifié par le texte", explique-t-il.

Et aussi 
Nous avons besoin de métaphores.
Nous avons besoin de regarder à nouveau, pour penser encore, pour ressentir par un autre biais.
Pour revenir à l’unité complexe et mouvante de tout ce qui fabrique de l’être.
Allez, on se fait une métaphore ?
Charles Robinson

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