Les
ADIEUX
Clément Bondu - Anne Lefèvre
Festival de théâtre de Figeac | 30 juillet 2021 |
APÉRO - RENCONTRE AVEC CLÉMENT BONDU |
Je vous livre l'impromptu que j'ai partagé en introduction de cette rencontre de l'artiste avec le public.
Clément Bondu, poète, écrivain, metteur en scène et musicien
né en 1988.
Après avoir intégré l’École Normale Supérieure en Lettres modernes et suivi une formation théâtrale dans différentes écoles (CNR-Lyon, ENSATT, CNSAD), il se consacre essentiellement à l’écriture, sous diverses formes — poèmes, romans, récits, pièces de théâtre, scenari, livrets d’opéra.
En musique, il développe avec son groupe Memorial* une recherche allant du post-rock à la pop en passant par les musiques électroniques et la musique de chambre.
Il a baptisé sa cie, Année zéro
L’année avant.
Clément Bondu ou quand la littérature monte au plateau.
Incroyable, cette saison au théâtre Le Vent des Signes, en septembre, tout le mois de septembre, on met en chantier "un laboratoire d’exploration du passage de la littérature au plateau " avec le romancier Charles Robinson, la chorégraphe Sandrine Maisonneuve, le réalisateur Loran Chourrau, le compositeur et interprète François Donato et l’auteure et metteuse en scène Nathalie Fillion.
3 de ces artistes sont invités du festival de théâtre de Figeac.
Premières bribes entendues hier soir.
C‘est pareil la lumière les portes le sol
Mais ce n’est plus le même monde.
"Les Adieux" de Clément Bondu…
un récit et le brouillage du récit
par l’intensité du verbe, la densité de la musique,
la densité du son.
Impression qu’on y ressasse
indéfiniment
éternellement
le même voyage
un voyage balisé de mémoires enfouies
qui se rejouent de terres en terres
de rencontres en rencontres
Et bien sûr Rimbaud et Kérouac
et Camus et Rilke
et Cendrars et la beat generation.
Un voyage sur les traces d’un voyage qui a déjà eu lieu avec ceux qui nous ont précédés
Nord-Sud/Est-Ouest/dedans/dehors.
Un voyage
inlassablement
presque nostalgiquement
le récit d’un voyage
le témoignage d’un voyage
pris dans une charge de nappe sonore

qui ne laisse guère d’issue.

«Ce que tu veux saisir se dérobe constamment"
"Tu roulais simplement cherchant le lieu et l’heure"
"Il pleuvait ce soir-là à Hanoi
Ni plus ni moins qu’ailleurs"
"Obscurité, mère de tous les vices"

"Tu n’as rien inventé"

 

Dans ce voyage,
dans le récit de ce voyage,
on retrouve
les alcooliques, les pauvres, les drogués, les prostituées – celles et ceux des Etats-Unis comme celles et ceux d’ Inde, d’Afrique, d’Amérique du Sud ou de Cuba..
On y retrouve

"Celle qui n’est jamais en bonne santé"

 

"Alors il y a toujours le coin à l’écart"
Mais il n’y a pas de rêve américain
Justement parce que l’Amérique veut la possibilité de vivre sans rêve
L’anti-rêve américain
C’est un désir de domination brutale sur tout ce qui change et qui passe
C’est le vide dans lequel elle peut enfin se mirer.
"Et tu te sentais si seul dans ce train très climatisé."
Et aussi Marinello --
deux phrases en espagnol de ce militant communiste dévoué – poète, écrivain, universitaire. Marinello et ses actions contre le dictateur Gerardo Machado, qui a sévit à Cuba, de 1924 à 1933. Professeur Marinello.
Professeur, on l’appelait dans le peuple.

"Et le ciel réapparaît soudain".
Et soudain, alors même que vous êtes en salle, sur le plateau de l'espace Mitterand, je vous vois poursuivre votre concert
en extérieur,
en plein air,
sur la scène de la Cour du Puy
je vous désire
dehors
sous le ciel étoilé
dans la nuit ouverte
dés-enserrée de ses étaux de béton.
Je vous vois, là,
poursuivre le voyage (ou le re-commencer) tout à nouveau comme sans cesse, libre des murs qui nous oppressent
et de l’air quasi irrespirable de la salle Mitterand.
Et plus tard,
plus loin,
« Une masse incandescente de nuages condensés de givre"
On saisit des bribes de ce voyage.
Un homme nous parle
se parle
On attrape des sons
des couleurs
des senteurs
des bruits cahotants
"Une lente plongée abyssale pareille à une fièvre.
Regarde
Regarde l’horizon
Et après
Loin après
Regarde les puissances
Mange les puissances si tu peux
Et loin loin
Et après
Après
Après
L’horizon"
Et aussi…
"Ainsi tout était simple
Jusqu’au soir
Où tu rejoignais les jardins somptueux de sultans"
Et quand j’entends cela, j’ai encore et encore l’impression d’avoir déjà entendu ce récit, j’ai l’impression d’avoir déjà fait ce même voyage – comme il arrive qu’on ait l’impression d’avoir déjà rencontré une personne que l’on croise pourtant pour la première fois.
Comme un voyage à répétition à travers les temps.

"Un jour tout retourne à ce dernier matin"
Et là les musiciens s’arrachent dans une écriture free jazz / hard rock incandescente
"Qui a écrit les villes ?
les montagnes ?
Les fleuves ?
Les forêts ?
N’aie pas peur
Ne crains rien
Nous resterons ici
Encore un peu
Et demain
Il nous faudra chercher un refuge
N’aie pas peur
Dors
Dors paisiblement"